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"L'avenir est dans la coopération interdisciplinaire"

Professeur Abramowicz, quand avez-vous été en contact pour la première fois avec des maladies rares ?

Je me souviens très bien d'un cas au tout début de ma carrière. Je faisais un stage aux soins intensifs d'un hôpital bruxellois lorsqu'une jeune fille atteinte d'une maladie hépato-rénale rare a été admise dans un état critique. Quelques mois plus tôt, elle avait reçu une transplantation rénale qui s'était bien déroulée. Les médecins étaient perdus. Elle ne présentait aucune des complications habituelles après une transplantation. Un jour, j'ai trouvé un médecin au lit de la patiente que je n'avais jamais vu aux soins intensifs auparavant. Il était le médecin en chef du département de néphrologie. Ce spécialiste des reins, qui avait initialement diagnostiqué la maladie rare chez la jeune fille a été en mesure de déterminer correctement la cause des complications. C'est alors que j'ai réalisé pour la première fois que les maladies rares sont des maladies spéciales qui nécessitent un traitement spécial.

Comment la génétique s'est-elle développée depuis que vous avez commencé ? Quel effet cette évolution a-t-elle eu sur les maladies rares?

Auparavant, l'accent était mis sur les gènes individuels ou les fragments de gènes. Les méthodes actuelles permettent d'examiner simultanément et avec une précision de plus en plus grande de nombreux gènes en parallèle. Ces méthodes nous permettent d'analyser tous les gènes pertinents pour certains symptômes en une seule étape. Cela nous permet aujourd'hui d'établir un diagnostic dans un tiers des cas. Dans les deux tiers restants, nous ne sommes pas encore en mesure de le faire. Pourquoi ? Dans certains cas parce qu'il ne s'agit pas de maladies génétiques. Dans d'autres cas parce que nous n’arrivons pas encore à "lire" la mutation génétique avec les méthodes actuelles. Parfois, il y a aussi des manquements dans l'interprétation des données, qui deviennent de plus en plus complexes. Seule une analyse en commun de tous les éléments génétiques et de tous les éléments cliniques du patient permettrait de trouver le diagnostic. C'est pourquoi nous avons créé des « Genome Boards » interdisciplinaires.

Les Hôpitaux Universitaire de Genève ont été un des premiers hôpitaux suisses à créer un centre de génome médicale et, comme mentionné, des "Genome Boards". Quelle a été votre expérience jusqu'à présent ?

Les « Genome Boards » réunissent des spécialistes de différentes disciplines et mettent en commun leurs expertises. Grâce à cette coopération, il est possible de trouver des réponses à des cas non résolus jusque-là. Ce sont des moments incroyables. Depuis l'ouverture fin février 2019, nous avons pu diagnostiquer 5% de patients supplémentaires. Et ce n’est que le début. Je suis convaincu que l'avenir appartient à la coopération interdisciplinaire dans les cas les plus complexes.

Les examens génétiques sont encore assez coûteux et ne sont pas toujours remboursés par les caisses maladies. Quelles sont vos expériences à ce sujet ?

La pratique actuelle donne souvent lieu à de longues discussions avec les assureurs. Bien que, dans de nombreux cas, nous obtenions un remboursement, cela pourrait être beaucoup plus simple. Des études montrent que le coût total pour les examens effectués avant un test génétique est dix fois plus élevé que le coût d'un test génétique ! Il serait donc moins coûteux d'effectuer le test génétique immédiatement, sans parler des avantages d'un diagnostic rapide pour les patients.

Pourquoi est-il si important d'obtenir un diagnostic alors que dans de nombreux cas, il n'y a pas de thérapie?

Un diagnostic correct change la vie des patients. Sans diagnostic, ils se sentent incompris, isolés et doivent subir de nouveaux tests encore et encore. C'est un soulagement incroyable de savoir de quoi vous souffrez. Même s'il n'y a pas de thérapie, il y a souvent des pour le traitement, par exemple en ce qui concerne le régime, ou la prise en charge précoce de complications prévisibles.

Ils ne sont pas autorisés en Suisse, mais les tests génétiques sont de plus en plus fréquents. S'agit-il d'une opportunité pour les maladies rares ou comportent-ils également des risques ?

Les tests génétiques et en particulier l'interprétation des données sont complexes, et demandent une formation pointue. Le risque d'erreur de diagnostic est élevé - dans les deux sens : ne pas poser le diagnostic, ou poser un diagnostic erroné.

Que souhaiteriez-vous pour les personnes atteintes d'une maladie rare à l'avenir ?

Les caisses maladie doivent être mieux informées qu’elles peuvent épargner de l’argent grâce aux examens génétiques. Cela ne veut pas dire non plus que nous devons tester tout le monde. Mais il faut garder à l'esprit que le coût des tests génétiques même les plus complexes, environ 5 000 CHF, est modeste par rapport au coût des nombreux tests inutiles pratiqués de façon itérative. Ensuite, nous devons veiller à ce que tous les patients qui en ont besoin aient accès au diagnostic génétique, par exemple dans un centre comparable au nôtre. Enfin, j'aimerais que nous ayons davantage de possibilités d'échanger des données sur les maladies rares pour la recherche, tout en garantissant, bien entendu, l'anonymat. Pour les maladies rares, la mise en commun des expertises, qui sont dispersées, est indispensable.

De plus amples informations : Centre de génomique médicale des HUG
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